avril 2018

All aboard !

« Rapprochons-nous » nous enjoint la SNCF. Pourtant, son sort divise aujourd’hui les français qui la jugent à la fois « trop » et « pas assez ».

Nous vous proposons de rester à quai (des débats) pour prendre un peu de recul et parler du train : quelle est sa place dans notre société de l’hypermobilité ? Comment peut-il répondre aux enjeux environnementaux et sociaux qui nous préoccupent de plus en plus ?

Le train : gare à l'exclusion

Sujet au cœur de l’actualité, les disparités d’accès au train ne datent pourtant pas d’hier. Dès la constitution du réseau dans les années 1930, les lignes convergent toutes vers Paris avant d’être progressivement délaissées au profit de la voiture personnelle. Et quand le train attire de nouveau les investissements publics dans les années 1980, c’est pour connecter les « villes TGV » à Paris, toujours.

Dans leur étude, Pierre Messulam, cadre à la SNCF, et Nacima Baron, géographe et enseignante-chercheuse, rappellent cette réalité et analysent que si les distances vécues se réduisent pour les habitants des « villes TGV », les zones moyennement peuplées voient leurs lignes « non viables » mises sur la sellette. Les écarts se creusent, entre inclus et exclus de la mobilité.

Pour les auteurs, investir davantage dans le train permettrait de répondre aux besoins de mobilité des usagers, sur le territoire français comme européen, tout en développant un transport écologique.

Bouger sans polluer (ou presque)

En Europe, le principal émetteur de CO2 n’est autre que le transport. Mais des solutions existent, comme le souligne ce rapport du CER (Community of European Railway and Infrastructure Companies) et de l’IUC (International Railway Association) qui compare les différents modes de transport.

Résultat : pour un trajet Berlin-Bruxelles, la personne voyageant en train émettra 38 kg de CO2 contre 125 kg pour celle en voiture. Idem pour les marchandises : si le fret ferroviaire était doublé, les émissions annuelles de CO2 liées au transport pourraient être réduites de 45 à 55 millions de tonnes de CO2.

Et ces résultats pourraient encore être améliorés : le rapport recommande ainsi à l’UE de non seulement convertir le réseau en tout électrique pour un train moins émetteur de CO2, mais aussi de le moderniser afin d’offrir aux usagers une voie de sortie du modèle prédominant de la voiture personnelle.

L'atout train

Car ce n’est pas uniquement sur les émissions de CO2 que le train est plus avantageux que la voiture. Que la comparaison s’effectue sur les accidents, les pollutions sonores, ou encore les impacts sur la biodiversité, le train ressort à chaque fois grand gagnant.

Le cabinet d’études DEGEST a ainsi réalisé une évaluation monétaire de tous ces impacts reportés sur la société (appelés aussi « coûts externes » ou « externalités »). Les externalités négatives de la voiture personnelle ont ainsi coûté la bagatelle de 380 millions d’euros aux contribuables français en 2016, soit 9 fois plus que le train la même année. Des chiffres qui remettent en perspective l’argument récurrent de la (non) viabilité économique du train, trop souvent perçu comme un coût pour la société.

Selon les auteurs du rapport, miser sur le train est le meilleur moyen pour l’Etat de réaliser des économies sur le long terme, tout en repensant de façon durable notre manière de se déplacer sur le territoire français.

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