mars 2018

Inondation, artificialisation : l’importance des sols

À quoi sert le sol ? Nous avons beau le fouler tous les jours, la question se pose rarement.

Pourtant, nous dépendons de lui à de nombreux égards et devons apprendre à mieux connaitre son fonctionnement – afin de le protéger et de nous protéger.

Car les sols artificialisés, c’est-à-dire modifiés par l’homme, perdent de leurs fonctions régulatrices naturelles.

Préserver les sols passe notamment par une approche différente de l’urbanisation.

La Terre, cette éponge

Crue récente de la Seine, inondations récurrentes sur le territoire… au-delà des dégâts et dérangements causés, il est utile de mieux comprendre la cause de ces phénomènes. C’est ce que permet ce compte-rendu didactique d’une conférence sur les fonctions du sol dans le cycle de l’eau réalisée par Jean-Pierre Montoroi, chercheur scientifique à l’Institut de recherche pour le développement (IRD).

Souvent associées au débordement d’un fleuve ou d’une rivière, les inondations peuvent être cependant tout autant liées à la stagnation des eaux pluviales. En temps normal, les sols permettent à l’eau de pluie de s’infiltrer jusqu’aux nappes phréatiques. Mais avec l’extension actuelle de l’urbain vers le péri-urbain et la « compactation » des terres liée à l’agriculture intensive, les sols français sont de plus en plus imperméables. Dès lors, ils peinent à remplir leur rôle d’éponge, le cycle de l’eau est perturbé et l’eau de pluie se retrouve en excès en surface.

A défaut de changer notre gestion des sols, nous risquons d’être de plus en plus confrontés à des inondations dans les prochaines années.

La qualité de notre air se joue sous nos pieds

Au-delà de son rôle dans le cycle de l’eau, le sol est aussi l’un des plus grands réservoirs de carbone de la planète. La matière organique contenue sous nos pieds renferme ainsi près de 1 500 milliards de tonnes de carbone.

Cette capacité de stockage varie néanmoins en fonction de la nature des sols et de leur composition, avec des conséquences importantes en termes d’émissions de gaz à effet de serre : ainsi, à l’échelle européenne, 1 % du carbone contenu dans la terre équivaut aux émissions annuelles d’un milliard de véhicules.

Or depuis les années 1970, les réserves de carbone dans les sols sont en diminution constante. En cause, les mêmes facteurs que pour la perméabilisation des sols, à savoir l’agriculture intensive et l’urbanisation croissante.

Dans le cadre de ce rapport, la Commission européenne propose donc une systématisation de la quantification des réserves carbone sur le territoire européen, afin de mieux statuer sur les usages des sols et réduire ainsi les émissions de gaz à effet de serre.

La ville : plus c’est dense, plus c’est durable !

Préserver les sols et ses différentes fonctions régulatrices pose la question de leur artificialisation et donc de l’urbanisation.

Selon ce rapport de l’ADEME, une ville plus dense est une ville plus durable car elle limite l’étalement urbain et l’artificialisation des sols associée. Les auteurs proposent donc « la ville sur la ville », c’est à dire la rénovation de l’existant plutôt que la construction de nouveaux bâtiments. Ils suggèrent par exemple de s’inspirer de l’architecture haussmannienne – à l’origine d’une densité très forte mais bien vécue par ses habitants. Ils plaident également pour la réhabilitation des friches industrielles et des espaces publics existant en espaces multidimensionnels : rendre ces lieux convertibles – entre vie, loisirs, nature ou encore travail – limite de fait leurs emprises et donc leurs impacts sur les sols.

Une ville durable est aussi une ville qui repense les mobilités. L’urbanisation doit alors s’organiser autour des grands axes structurants et des pôles de transports en commun pour limiter à la fois les déplacements polluants et l’extension des sols artificialisés.

Construction, consommation d’espace, déplacements… Il semblerait que désormais, moins soit mieux.

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